SECTEUR AUTOMOBILE : POURQUOI CA NE ROULE PLUS A LA BRVM ?

Le 16 mars 2016, l’action CFAO CI atteint le seuil des 150 000 l’unité. C’etait l’un des plus hauts niveaux atteint par le N°1 de la distribution de véhicules neufs dans son histoire à la BRVM. L’action restera à ce niveau durant onze séances avant de redescendre peu à peu. Le 10 janvier 2017, CFAO CI passe sous le seuil des 60 000. L’entreprise aura perdu 60% de sa valeur boursière en 9 mois.

TRACTAFRIC MOTORS CI (TMCI) suivra un chemin analogue. Echangée autour de 720 000 l’unité entre le 08 mars et le 16 mars 2016, l’action du N°2 est passée sous la barre des 300 000 l’’unité depuis le 16 janvier 2017.

Que s’est-il passé durant les 9 derniers mois pour que les deux leaders du marché des véhicules neufs perdent plus de la moitié de leur capitalisation boursière ?

Aujourd’hui, allons à la rencontre d’un secteur qui ne séduit plus les investisseurs.

Bienvenue dans le 3e numéro de l’année 2017 de votre rubrique DECRYPTAGE.

SECTEUR AUTOMOBILE : POURQUOI CA NE ROULE PLUS A LA BRVM ?

I- PRESENTATION DU SECTEUR ET HISTORIQUE

Le secteur automobile en C.I est composé de deux marchés : le marché des véhicules neufs et celui des véhicules de seconde main. CFAO CI et TMCI s’affrontent sur le marché du neuf avec deux autres sociétés : la SOCIDA, filiale du groupe antillais Bernard Hayot (GBH) et ATC COMAFRIQUE de la famille Billon.

Ce marché a été très affecté par la crise socio-politique des années 2002-2010. Les ventes de véhicules neufs ont oscillées entre 3300 et 5200 véhicules de 2005 à 2011. Dans ce contexte, les performances des sociétés cotées et les cours de leurs actions en ont impactés. En 2011, CFAO CI a réalisé un chiffre d’affaires de 19,6 milliards pour un résultat net de 356,8 millions. L’action CFAO CI cotait à 16 000 le 31/12/2011. Les ventes de TMCI s’élevaient sur la même période à 26,5 milliards pour un bénéfice de 893,8 millions pour une action qui s’échangeait à CFA 80 000 l’unité.

Dans ces conditions, on remarque déjà que les actions de ces entreprises ont été quasiment multipliées par dix entre 2011 et 2016 (16 000 à 150 000 pour CFAO et 80 000 à 700 000 pour TMCI).

Comment expliquer une telle croissance ?

II- LES EVOLUTIONS ET LES EVENEMENTS D’APRES 2011

1- La hausse de la demande

Après la crise dans le pays, il a fallu réinvestir pour relancer les activités et remplacer les biens détruits. Dans ce sens, le marché a enregistré une hausse importante de la demande de véhicules neufs. Ainsi nous sommes passés de 5 264 véhicules vendus en 2011 à 8 157 en 2013 puis 10 014 en 2015. Cette hausse a été bien sur très profitable pour les concessionnaires auto. CFAO CI a réalisé un chiffre d’affaires de 75,26 milliards en 2015 pour un bénéfice net de 4,63 milliards. Pour sa part, TMCI aura engrangé des recettes à hauteur de 55,8 milliards pour un bénéfice de 2,78 milliards.

Ainsi on peut noter que les profits de la CFAO ont été multipliés par 13 en 4 ans tandis que ceux de TMCI progressait de seulement 311% sur la même période.

2- La fusion CFAO CI et SARI CI

Un autre évènement va renforcer l’une de ces deux sociétés. En effet, le 02 avril 2012, la société SARI CI a été absorbée par CFAO MOTORS CI. Cette opération a donnée naissance au N°1 de la distribution dans le secteur. Cette opération a renforcé les performances et les actifs initiaux de CFAO CI.

Devant ces performances, le marché boursier a réagi favorablement. L’action CFAO CI est passée de 16 000 au 31/12/2011 à 91 000 au 31/12/2015 soit une hausse de 500% en 4 ans. TMCI quant à lui n’a ’’ progressé que de 400% ’’ sur la même période terminant autour des 400 000 l’unité.

Dans de telles circonstances, comment expliquer le fort recul de ces valeurs en fin 2016-début 2017 ?

III- LES MAUVAISES LECTURES DE 2016

Ce fort recul est dû aux mauvaises performances de ces sociétés en 2016 et aux révélations apportées par leurs rapports annuels. Les investisseurs qui sont entrées sur ces valeurs à ces niveaux de prix (150 000 pour CFAO ou 700 000 pour TMCI) ont fait des mauvaises lectures.

  • Une mauvaise lecture des résultats

Sur le marché financier, les investisseurs ont pour la plupart du temps coutume de se positionner sur des valeurs dont les résultats sont annoncés meilleurs. Il faut préciser qu’au 31/12/2015, aucun résultat de l’exercice 2015 n’est encore disponible. Toutefois, on peut les conjecturer à partir des résultats périodiques et des articles de certaines revues spécialisées. Ainsi durant le            1er trimestre de l’année 2016, les investisseurs qui ont  anticipé de meilleurs résultats 2015 sur le secteur automobile se sont positionnés sur ces valeurs. Ce mouvement acheteur a entrainé une hausse qui a attiré de nouveaux investisseurs et ainsi de suite (comme avec CROWN SIEM actuellement). Toutefois, ces résultats étaient certes meilleurs mais avaient un caractère exceptionnel.

Prenons le cas de la CFAO CI, Le chiffre d’affaires 2015 était de 75,2 milliards en hausse de 20% par rapport à 2014 et le résultat net de 4,63 milliards en hausse de 23%. Belle année me direz-vous ? Sauf que ces chiffres contiennent la cession de certaines activités B2B (poids lourds, pneumatiques, chariots élévateurs… ) vers CFAO EQUIPMENT, une autre entité du groupe. Cette cession aura rapporté plus de 10 milliards de recettes et 1 milliard de profits à CFAO MOTORS. Ainsi le marché a découvert et intégré par la suite (publication du rapport) que CFAO CI n’a pas gagné plus d’argent parce qu’il avait de meilleures performances mais juste à cause de la cession d’une partie de son fonds de commerce.

  • Une mauvaise lecture des activités de CFAO CI

Les investissements du groupe CFAO dans les grandes surfaces avec CARREFOUR et dans la  brasserie avec HEINEKEN ont attiré certains investisseurs. J’ai reçu beaucoup de questions à ce sujet et il y’a même eu un petit débat sur le groupe L’ECOLE DE LA BOURSE sur l’impact de ces nouvelles activités sur les chiffres de la CFAO. Sauf qu’il s’agissait du groupe CFAO et non de CFAO MOTORS. Le groupe a plusieurs activités en C.I gérées par plusieurs filiales. Ainsi le projet BRASSIVOIRE est piloté par CFAO INDUSTRIES (non cotée à la BRVM) et PLAYCE MARCORY est sous la gestion de SGI AFRICA, société foncière créée par le groupe CFAO pour l’accompagner dans ses projets de grande distribution. Aucune de ses deux activités n’aurait un impact positif sur les chiffres à venir de CFAO MOTORS CI.

  • Une mauvaise lecture de l’état du marché et de ses perspectives

Dans une interview qu’il a donnée le14/10/2016 au quotidien Fraternité Matin, le DG de CFAO CI expliquait que le marché du véhicule neuf était très chahuté par celui des véhicules d’occasion. Ce dernier porterait sur près de 35 000 véhicules contre 9 000 pour celui du neuf. Depuis plusieurs années, cette concurrence contrarie le développement des concessionnaires au point que CFAO MOTORS envisage de lancer une offre de qualité sur ce segment.

De plus, les ventes du neuf devaient connaitre un repli de 5% en 2016 (9500 véhicules) selon le rapport annuel 2015 de TMCI. L’année 2015 était une année exceptionnelle à cause des élections en Cote d’Ivoire. Au final, le marché a reculé de plus de 10% à 8960 unités selon une enquête de l’hebdomadaire JEUNE AFRIQUE publiée le 13 janvier 2017.

QUE RETENIR ?

Je ne le dirai jamais assez. Acheter des actions, c’est acheter des parts d’entreprises qui vivent, qui se développent, qui ont de la concurrence…. Trop d’investisseurs individuels engagent leurs épargnes avec trop peu d’informations et d’analyses sur les sociétés cotées. Vouloir gagner de l’argent avec des actions CFAO acquises à 130 000 ou à 150 000 reposait sur quoi ?

Les perspectives ? Elles n’étaient pas reluisantes à cause de la présence du marché de l’occasion.

Les performances? Elles étaient tronquées à cause des activités exceptionnelles

La valorisation ? Avec un PER de 43 et un PBR de 9, CFAO était clairement surévaluée au 31.12.2015.

La baisse constatée ces derniers mois est à mon avis est un retour à des seuils plus raisonnables pour des sociétés dont les performances et les perspectives ne justifiaient pas à mon avis de telles niveaux de valorisation. Mais, il est fort possible que de nouveaux investisseurs se positionnent sur ces actions vu leurs nouvelles valeurs et nous voilà reparti pour une de nouvelles hausses.

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Merci et bonne suite de journée.

ARTICLE ECRIT LE 19 JANVIER 2017.

 

 

 

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